" La beauté d’Arouna rend Nora lyrique... La peau aussi, ne comme de la soie, d’un noir bleuté, ce qui accentue le côté idole bienveillante. Les jours où il va bien, il est un dieu tutélaire dont les traits forcent l’attention. Il est de ceux que l’on a déjà arrêtés dans la rue pour leur dire qu’ils sont beaux.
À cause du nez noble, légèrement busqué dont les ailes minces révèlent une sensibilité aigue, à cause de la bouche aux lèvres pleines mais pas épaisses, découvrant parfois un sourire d’en- fant plein de santé, à cause de deux traits de pinceau symétriques et japonais coiffant des yeux longs et écartés de ceux que l’on dit en amande ou de gazelle, fuyant la plupart du temps pour échapper au regard inquisiteur, suspicieux condescendant des blancs... surface. Toutes ces années s’étaient écoulées sans qu’il ne se manifeste et là, à cause ou grâce à ce yaourt, il remonte tel que remonte du fond de l’estomac du vomi avant de jaillir hors de la bouche. En jets puissants. Je les revois quasiment en même temps, tous ces gens que j’ai tués. Ce n’est pas beau à voir, croyez-moi. Mais c’est comme ça. C’est la vie. Du moins, c’était ma vie. "